Un texte de Miloud CHORFA , Membre du forum et écrivain.
Le précipice de la mort
Un cri, du haut de la montagne parvient jusqu’au bas de la vallée. C’est le cri de la mort que j’ai entendu ce matin là lorsque, avec mes amis, nous avons décidé d’arpenter la route qui nous mène vers le sommet de Chélia. Nous avons vu le précipice, sur son bord une stèle blanche sur laquelle est inscrit un témoignage, oui un témoignage historique. Hommage aux morts de la révolution algérienne. La montagne est toujours là, impassible. Rien ne l’ébranle, rien ne la fait frissonner. Majestueux, le « Ras Keltoum » règne sur la chaine des Aurès, il était le protecteur, il était le giron qui accueillait les moujahidine. Il accueillait la révolution, il alimentait le feu, il se faisait piétiner par le mécréant envahisseur, il supportait l’infamie et le meurtre. Un cri de douleur que seuls de rares personnes sensibles peuvent imaginer et entendre. Le cri strident, déchirant l’espace aussi vaste que la portée du regard, réveille les morts qui ne veulent plus revenir sur cette terre qu’ils ont libérée. Une femme lève les yeux au ciel, elle croit reconnaitre la voix, son regard rencontre un corps balancé du haut du précipice. Elle tend les bras instinctivement, elle essaie de le rattraper depuis cette vallée, cette plaine intérieure où son homme a toujours vécu. Il crie, le cri est strident, il rappelle celui de l’aigle. La femme tombe à terre, elle pleure, elle vient d’assister à la mise à mort du père de ses enfants. Les militaires français l’avaient ravi à sa famille, c’était par une journée ensoleillée ; une jeep s’arrêta dans cette clairière au pied de Chélia, suivie de plusieurs camions. Des militaires en descendent. Ils sont armés jusqu’aux dents, un jeune homme discutait avec son père, un vieillard qui se racontait le passé. Il savait que ces militaires n’étaient pas des messagers de la paix. Son fils est frappé, il est malmené, il comprend tout, il sait que la traitrise l’a désigné à la mort. Le temps passe, il n’y a aucune nouvelle depuis quelques semaines, depuis qu’il est séquestré par l’armée française. Et voila que son épouse reçoit le dernier message du haut de cette montagne que tous vénèrent. C’est la protectrice des chaouias qui est utilisée pour donner la mort aux valeureux de cette terre libre. Des dizaines d’hommes ont connu cette affreuse mort, ils ont été jetés tels des objets sans valeur aucune. Nous devons reprendre le cours de l’histoire, ce fleuve de sang. Que les amis de Khenchela aillent voir la révolution, elle leur sera racontée par ces lieux où le baroud ne s’est tu qu’après une lignée de chouhadas. Que vive l’Algérie. |
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